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Tierno Monenembo en colère : ‘’les historiens africains n’ont jamais fait leur travail, ce sont des démagogues’’

L’écrivain guinéen, en pleine promotion de son nouveau roman Saharienne indigo, Tierno Monénembo, Prix Renaudot et Grand Prix de la Francophonie, était jeudi l’invité de Patrick Simonin sur le plateau de la chaine TV5.

L’auteur de l’ouvrage Les Crapauds-Brousse pense qu’il est temps pour les hommes de lettres et de culture de s’intéresser davantage à l’histoire de la Guinée. Tierno Monénembo croit dur comme fer que la littérature reste l’alternative pour la préservation de l’histoire.

‘’D’autant que la presse n’a jamais été réellement curieuse de violences de toutes sortes que la Guinée a subies depuis 1958, il est temps que la littérature s’y intéresse. La littérature est plus perspicace, plus profonde. Et le jugement littéraire est plus durable, plus sérieux et plus honnête. Il fallait que l’histoire de la Guinée depuis 1958 soit racontée dans un roman. Et ce roman, je viens de le faire’’, indique-t-il en faisant référence à son ouvrage Saharienne indigo.

Dans cette œuvre, le célèbre écrivain guinéen relate ‘’le chemin d’enfer’’ de la Guinée.  Dans son récit ‘’cette jeune fille [personnage du roman] porte sur sa tête tous les malheurs du pays. Elle est née au camp Boiro pour commencer. Elle ne voulait pas raconter tout ça, elle rencontre à Paris une française qui a fait la Guinée et qui a subi la même chose et qui l’oblige à en parler (…)’’.

A ceux qui ont encore des doutes, Tierno Monénembo enseigne que le camp Boiro avait bien existé. ‘’Ça existait mais vous savez que c’est la culture de l’époque. C’est l’époque où on peut avoir de droit et de vie sur ses semblables, ses citoyens. On a eu Staline, Mao, Sékou Touré. Ces gens-là avaient raison sur tout parce qu’ils mentaient, savaient mentir. Ils ont promis le paradis aux êtres humains. C’est l’école secondaire du communisme. Ce n’est pas la peine de justifier devant n’importe quel africain sur Sékou Touré. Il faut juste écrire sur ce qui s’est passé au camp Boiro’’, estime-t-il.

‘’Il faut savoir dompter son passé. Le grand problème, c’est ça. Il faut faire en sorte que le passé ne soit plus l’enfer. Que ce soit une source de gloire et d’espoir. Que le passé soit un véritable tremplin de promesse vers l’avenir’’, souhaite-t-il.

Malheureusement, déplore-t-il, ‘’chez nous, le passé est toujours trafiqué. Il y a un trafic de mémoire en Afrique qui est insupportable. Dans tous les pays notamment ceux qui ont brillamment obtenu leurs indépendances, la Guinée, l’Algérie, le Ghana, le Congo, le Zimbabwe, le trafic de mémoire y est. Qui va un jour nous raconter la véritable histoire algérienne ? Qui va un jour raconter la véritable histoire de l’indépendance guinéenne ? Nos historiens n’ont jamais fait leur travail’’.

Il dit à qui veut l’entendre que ‘’les historiens africains n’ont jamais fait leur travail, ce sont des démagogues’’. C’est pourquoi, souligne-t-il, ‘’c’est à nous écrivains de le faire. Et nous allons le faire littérairement’’.

Boussouriou Doumba, pour VisionGuinee.Info
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