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Einstein et Dieu : la lettre qui valait 2,5 millions d’euros

 Quand on est le plus grand physicien du XXe siècle, que pense-t-on de Dieu et de la religion? Une lettre manuscrite d’Albert Einstein dans laquelle le physicien met en doute l’existence du Dieu des religions monothéistes a été vendue le mardi 4 décembre 2018 à New York 2,89 millions de dollars lors d’enchères organisées par Christie’s.

Avec le Huffington Post et France Culture

Dans la lettre datée de 1954 et écrite en allemand à l’adresse du philosophe Eric Gutkind, Einstein réfute toute croyance religieuse, lui le Juif qui avait fui l’Allemagne après l’avènement d’Hitler.

“Le mot Dieu n’est pour moi rien d’autre que l’expression et le produit des faiblesses humaines, et la Bible un recueil de légendes vénérables mais malgré tout assez primitives”, écrit le chercheur depuis l’université de Princeton, dans le New Jersey, un an avant sa mort en avril 1955.

“Aucune interprétation, aussi subtile soit-elle, n’y changera rien (pour moi)”, ajoute-t-il dans cette missive d’une page et demie. La dernière vente de cette lettre remontait à 2008, lorsqu’elle avait été adjugée à un collectionneur privé pour 404.000 dollars, a précisé Christie’s.

Dans sa lettre, l’auteur de la théorie de la relativité, décédé à 76 ans, n’épargne pas le judaïsme. “Pour moi la religion juive est, comme toutes les autres religions, l’incarnation d’une superstition primitive”, écrit-il. “Et le peuple juif auquel j’appartiens fièrement, et à la mentalité duquel je me sens profondément ancré, n’a pas pour autant une forme de dignité différente des autres peuples”.

“Au vu de mon expérience, ils ne sont pas meilleurs que les autres groupes humains, même s’ils sont protégés des pires excès par leur manque de pouvoir. Sinon je ne perçois rien d”élu’ chez eux.”

Einstein croyait au Dieu de Spinoza

Comme le rappelle France Culture, Albert Einstein faisait peu de cas du Dieu des religions monothéistes, mais n’était pas purement athée pour autant. Ainsi, en 1929, il expliquait au rabbin Herbert Goldstein croire “au Dieu de Spinoza qui se révèle dans l’harmonie de tout ce qui existe mais non en un Dieu qui se préoccuperait du destin et des actes des êtres humains”.

Au XVIIe siècle, le philosophe néerlandais a théorisé un Dieu, qu’il appelle également la Nature, qui englobe toute chose, n’est pas à l’image de l’Homme et n’a pas de dessein particulier. Si Einstein aime ce concept, c’est à cause de sa vision de l’univers, comme il l’explique en 1936 à une jeune fille qui lui demande si les scientifiques prient:

La recherche scientifique est basée sur l’idée que tout ce qui arrive est déterminé par les lois de la nature, et cela s’applique également pour les actions des gens. Pour cette raison, un scientifique aura difficilement tendance à croire que les événements peuvent être influencés par des prières, i.e. par un souhait adressé à une entité surnaturelle.

Pour autant, il faut admettre que notre connaissance actuelle de ces lois est simplement imparfaite et fragmentaire, ainsi, en réalité, la croyance en l’existence de lois universelles de la Nature repose sur une sorte de foi. Malgré tout, cette foi a été largement justifiée jusqu’alors par les succès de la recherche scientifique.

D’un autre côté, n’importe qui de sérieusement impliqué dans la poursuite de la science devient convaincu qu’un esprit est manifeste dans les lois de l’Univers. Un esprit largement supérieur à celui d’un homme, et en face duquel nous, avec nos modestes pouvoirs, devons nous sentir humbles.

Dans ce sens, la poursuite de la science mène à un sentiment religieux bien spécial, qui est effectivement bien différent de la religiosité de quelqu’un de plus naïf.

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