En tant que développeur immobilier agréé par l’État du Sénégal, fort d’une expérience de terrain
et d’une veille active sur les modèles urbains réussis à l’international, je souhaite contribuer de
manière constructive au débat ouvert ce 2 septembre autour du projet « Dakar Métropole 2050
».
Son Excellence Monsieur le Président Bassirou Diomaye Faye, Monsieur le Premier Ministre
Ousmane SONKO, votre arrivée aux responsabilités a suscité un espoir profond, fondé sur la
promesse d’une gouvernance éthique, pragmatique et tournée vers des résultats concrets. C’est
dans cet esprit de loyalisme actif que nous vous adressons ce message.
L’Afrique est en mouvement. Le Sénégal aussi. Et Dakar, notre capitale, se trouve à la croisée
des chemins : entre rêve métropolitain et urgence sociale, entre projections futuristes et réalités
du quotidien.
Le projet « Dakar Métropole 2050 », propose une vision. Mais l’histoire nous a appris que les
visions sans stratégie d’exécution deviennent des mirages coûteux. Une vision sans exécution
est une distraction.
Le Sénégal de ce gouvernement de rupture n’a pas besoin d’un rêve lointain. Il a besoin d’un
plan. Dakar n’a pas besoin d’une métropole imaginaire. Elle a besoin de fondations solides.
Et les Sénégalais n’ont pas besoin de maquettes futuristes. Ils ont besoin de logements, d’eau,
d’électricité, de dignité.
Le projet « Dakar Métropole 2050 » nous promet une ville du futur. Mais que vaut une promesse
si elle ignore les urgences du présent ? Que vaut une vision si elle ne s’accompagne pas d’une
méthode, d’un calendrier, d’un budget, d’une volonté politique ?
Nous avons vu ce scénario. Trop de fois.
Le programme des 100 000 logements ? Oublié. Parce que c’était de la communication
politique, parce qu’il n’a jamais été sérieusement pensé et rigoureusement mis en œuvre.
Des annonces spectaculaires, des conférences, des visuels… mais peu d’exécution.
Ce modèle d’urbanisme spectacle ne peut plus durer. Ce pattern est usant. Il érode la confiance.
Il détourne l’énergie publique des urgences réelles.
Aujourd’hui, nous devons changer de paradigme. Nous devons passer du rêve à l’action. Du
futur hypothétique à l’urgence concrète. De la projection à la construction.
Et pour cela, les solutions existent. Elles sont réalistes. Elles ont fait leurs preuves ailleurs. Le
Maroc, le Rwanda, la Chine, le Brésil, la Colombie, l’Éthiopie… autant de nations qui ont su
conjuguer ambition et pragmatisme pour transformer leurs villes et améliorer la vie de leurs
citoyens.
Il faut écouter les leçons du monde.
De ces pays qui ont relevé des défis bien plus grands. Ils ont logé, structuré, réhabilité.
Ils ont planifié, financé, exécuté.
Le Sénégal peut faire de même.
Mais il doit commencer maintenant.
Trois urgences. Trois leviers. Trois preuves que le Sénégal peut réussir.
- Résorber le déficit de 500 000 logements : une priorité nationale
Ce chiffre n’est pas abstrait. Ce sont des familles sans toit. Des jeunes sans perspectives. Une
pression sociale qui monte. Et un frein au développement.
Le Maroc, avec son programme « Villes sans bidonvilles », a relogé 1,5 million de personnes
en moins de dix ans. Le Rwanda a industrialisé la production de logements abordables avec des
techniques modernes et locales. La Chine a logé des centaines de millions de personnes en
quelques décennies.
Le Sénégal peut faire mieux. Il doit faire vite. Ce qu’il faut, c’est un plan de gouvernance et de
financement massif, mobilisant immédiatement le secteur privé agréé. Chaque jour perdu
aggrave la crise. - Structurer les nouveaux territoires : une nécessité impérieuse
La croissance urbaine ne s’improvise pas. Elle se planifie. Elle se prépare.
La Chine et l’Éthiopie ont montré la voie : viabilisation préalable des terrains, infrastructures
de base, création de valeur avant toute urbanisation. C’est ainsi qu’on évite l’anarchie. C’est
ainsi qu’on construit des villes durables.
Le Sénégal doit adopter une planification directive, territorialisée, anticipée. Pas en 2050. Dès
maintenant. - Restructurer les quartiers précaires : une exigence de justice sociale
À Medellin, à Rio, les favelas ont été transformées par l’équipement de base, la sécurisation
foncière, la dignité retrouvée. Escaliers mécaniques, bibliothèques, assainissement, titres de
propriété… Ce n’est pas du rêve. C’est du courage politique.
Le Sénégal peut faire de même. Il doit le faire pour honorer sa promesse de rupture et de justice
sociale.
L’heure n’est pas à la poésie urbaine. Elle est à l’action concrète.
Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre, votre arrivée aux affaires a suscité un
vent d’espoir sans précédent. Mais cet espoir ne survivra que s’il se traduit en actes.
Ne vous laissez pas distraire par des projections lointaines. Ne vous laissez pas séduire par des
maquettes futuristes. L’heure est à l’ingénierie de la dignité. À l’exécution rigoureuse. À la
mobilisation des acteurs sérieux.
Notre crainte est que certains services, par habitude ou confort, vous présentent le projet pour
2050 comme la solution, alors qu’il est peut-être l’alibi de l’inaction sur le présent. Vous êtes
sans doute abusés par un jeu de spectacle qui, sous couvert de modernité, éloigne de l’action
concrète.
Nous vous en supplions : recentrez l’énergie de l’administration sur l’exécution de ses priorités.
Exigez des plans d’action chiffrés, calendés, réalistes. Recentrez l’administration sur trois axes
: logement, viabilisation, restructuration. Le secteur privé agréé est prêt. Il peut beaucoup
apporter.
La plus belle métropole de 2050 sera celle dont les fondations auront été posées en 2025. Par
des décisions courageuses. Par une méthode éprouvée. Par un travail opiniâtre.
Le Sénégal n’a pas besoin de rêves lointains pour justifier l’inaction présente. Il a besoin de
résultats. Il a besoin de méthode. Il a besoin de vous.
Il a besoin d’un cap clair, d’une méthode éprouvée, et d’un courage politique à la hauteur des
attentes populaires.
Les métropoles ne naissent pas des maquettes.
Elles naissent des fondations posées dans le réel. Elles naissent de la volonté de loger, de
structurer, de réparer. Elles naissent de l’écoute des leçons du monde et de l’engagement à les
adapter avec intelligence.
Ce que nous demandons n’est pas un miracle.
C’est un plan. C’est une mobilisation. C’est une exigence de vérité face aux urgences.
La crédibilité de l’action publique, la vôtre surtout, se joue maintenant. Pas en 2050. Pas dans
les salons. Pas au Grand Théâtre.
Mais dans les quartiers, sur les chantiers, dans les actes.
Dakar peut devenir une métropole exemplaire.
Mais seulement si elle commence par être une ville juste. Et cela commence aujourd’hui.
Saliou Dramé
Directeur Général de IMMOSEN, agréée par la CAPIP (N°000188/MRUHCV/DP en 2015 et
N°0822/MRUHCV/PDHS en 2018)
Développeur immobilier Spécialiste en développement local et en Ingénierie de projets
structurants
