Crise ou semblant de crise au sommet de l’ETAT du Sénégal, la question permanente reste la suivante: de quoi avons-nous peur ?
D’une crise économique qui s’empire ?
D’une menace d’instabilité de nos institutions à cause d’une dualité au sommet de l‘Etat ?
Des conséquences d’une confusion Parti-Etat et respect du fonctionnement de l’ETAT dans sa mission régalienne?
D’une dictature rampante au nom d’une rupture systémique?
D’une paralysie parlementaire au nom d’une obéissance aveugle à un leader politique ?
De Senghor à Macky en passant par Diouf et Wade, notre démocratie a certes vacillé de temps en temps comme dans toute démocratie en construction mais notre République n’a jamais été à terre. Aucun citoyen quel que soit son appartenance partisane ne devrait accepter que notre république s’effondre.
Cependant les faits sont là, ceux qui doivent incarner la République en commençant par le chef du Gouvernement, certains directeurs et autres, sont ceux qui fragilisent la République en désacralisant l’ETAT au profit de besoins purement politiques. Une fois au pouvoir, à peine deux ans de gouvernance, ils ont une seule préoccupation la conservation du pouvoir (plus pour la jouissance que pour la satisfaction des besoins des citoyens pour le moment) à travers des calculs pour es échéances électorales de 2027 et surtout de 2029.
Quand un chef de gouvernement:
- accuse indirectement son collègue ministre d’une supposée malversation et que ce dernier n’est pas encore inquiété
- défit et remet en cause l’autorité du Président de la République, clé de voûte de nos institutions
- critique ouvertement des magistrats de notre plus haute juridiction
- menace la presse , la société civile, les chroniqueurs et certains citoyens
- invite à la désobéissance civile si ses vœux ne sont pas appliqués
- refuse de respecter des préséances protocolaires
- Et que malgré tout cela, des gens applaudissent, cela pose problème, de quoi avons-nous peur ?
On ne peut combattre l’administration et la justice en s’attaquant à des personnes à cause de leur appartenance pour soit disant changer le système. Au contraire la bonne démarche républicaines pour changer le système c’est de réformer en profondeur la justice et l‘administration, c’est par cette voie que nous pouvons solidifier nos institutions tout en aspirant aux changements.
Je rappelle que la fragilité des institutions peut affaiblir la démocratie en minant la confiance des citoyens, en réduisant la participation citoyenne et risque de favoriser l’instabilité et l’inefficacité, voire même ouvrir la voie à des formes de gouvernance autoritaires. Lorsque les institutions sont perçues comme déconnectées des besoins du peuple ou incapables de fonctionner correctement, cela peut conduire à un désengagement des citoyens, à une défiance accrue envers les dirigeants et à une radicalisation du débat public.
Certes les sénégalais ont voté en mars 2024 pour le tandem Diomaye-Sonko, par espoir pour
un changement basé sur la rupture et la compétence et non pour des états d’âmes, des indignations du sur les dérives du régime passé, encore moins pour des ambitions personnelles de conservation du pouvoir. Au contraire l’urgence n’est pas de tenir en haleine les populations sur des querelles politiques internes et externes mais plutôt de faire face aux difficultés quotidiens des sénégalais qui ont d’une crise économique qui s’empire: (plus de bourses familiales, vie chère, loyer, eau, électricité chômage, inondations, immigration clandestine, accès à la sante et à une éducation de qualité.)
Nous ne sommes ni pour Massamba ni pour Mademba, ni pour Paul ni pour Jean, nous sommes
pour une République où règne la sacralité de l‘ETAT et le respect de la séparation des trois pouvoirs. Car nous devons éviter toute crise de légitimité qui a pour conséquences: un manque de capacité des institutions à agir efficacement, créant un cercle vicieux de faiblesse et de méfiance aux yeux de la population.
Nous ne devons pas accepter que nos institutions deviennent faibles car cela peut augmenter les risques de conflits, car elles ont moins de capacité à résoudre les tensions internes et à maintenir la paix civile. Tous les citoyens doivent rester vigilants pour veiller sur les valeurs républicaines qui constituent le ciment de la société, empêchent toute fragmentation et assurent la coopération et le respect mutuel entre les citoyens, la cohésion sociale et vivre-ensemble. Quel que soit la rigueur de nos dirigeants, l‘instauration d’une dictature à travers le parti avant l‘Etat, ne pourra prospérer car les citoyens ne vont jamais accepter la remise en cause de leurs acquis démocratiques et veilleront à ce que l‘ Etat incarne la bonne gouvernance et garantit les droits fondamentaux à tous les sénégalais.
Nous disons oui pour la reddition des comptes mais dans le respect des procédures qui prennent en compte les droits humains, la présomption d’innocence et le droit à un procès équitable. Et dans la transparence que toutes les personnes qui auront fait de la médiation pénale soient non seulement connues mais aussi que le gouvernement nous dise où l ‘argent récupéré a été investi.
Nous invitons le chef de l‘ETAT à mettre en place une commission indépendante de justice, vérité, paix et réconciliation afin d’apaiser la tension politique et sociale du moment et de statuer sur le cas des victimes des évènements de 2021 à 2024. Mais au préalable nous demandons aux parlementaires d’abroger définitivement la loi d’amnistie pour faire la lumière sur les morts lors des manifestations sans oublier le cas deux vaillants serviteurs de l‘Etat Fulbert Sambou et Didier Badji.
Nous osons espérer que l’héritage du Président Senghor sur l’organisation et la méthode, ne sera pas négligé par nos nouvelles autorités, pour avoir une administration moderne, efficace et structurée capable de soutenir la politique de développement économique et social du pays. Une administration qui était perçue comme un outil essentiel pour réaliser les objectifs nationaux à travers la sacralité d’un ETAT fort.
DENIS NDOUR
Consultant en Droits Humains
Vice-Président de la LSDH
Email denisndour@gmail.com
