Affaire Madiambal : un sursis à statuer qui doit entraîner la libération de sa famille prise en otage (Par Pr Cheikh Faye)

La Chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Versailles a vidé son délibéré, dans l’affaire de la demande d’extradition faite par le Sénégal à l’encontre de Madiambal Diagne, en décidant, le mardi 25 novembre 2025, d’un sursis à statuer, le temps d’obtenir, de l’État sénégalais, d’ici le 21 janvier 2026, de plus amples informations sur sa demande avant de rendre un jugement définitif le 3 février 2026.
En termes simples, la décision de sursis à statuer est une mesure, prise par un juge, qui suspend une affaire pour un temps déterminé ou jusqu’à la survenance d’un événement prévisible. En droit positif français, il peut être obligatoire (s’impose au juge) ou facultatif (laissé à l’appréciation du juge). Dans ce dernier cas, le juge prend la décision de sursis à statuer pour répondre à un impératif de bon déroulement du procès, donc d’un souci d’une bonne administration de la justice.
Selon la législation en France, toute demande d’extradition adressée au gouvernement français doit être accompagnée notamment soit d’un jugement ou d’un arrêt de condamnation, soit d’un acte de procédure pénale renvoyant la personne poursuivie devant une juridiction répressive, soit d’un mandat d’arrêt, pourvu que ces derniers actes renferment l’indication précise du fait pour lequel ils sont délivrés et la date de ce fait. Ces actes doivent être produits en original ou en copie certifiée conforme.
En prenant connaissance du dossier que leur a soumis l’État sénégalais, les juges français en sont arrivés à la conclusion que celui-ci ne contient pas d’éléments factuels, matériellement établis, qui indiquent, clairement, les faits reprochés au sieur Madiambal Diagne, ni les dates de commission de ces faits conformément aux exigences de la législation française. En termes clairs, cela voudrait dire que le dossier transmis par l’État du Sénégal serait vide ! Un camouflet de plus pour celui-ci, qui déteint sur la crédibilité de la justice sénégalaise et qui fait peur quant à la légèreté ayant conduit à une telle déconvenue.
Le rôle des juges français dans cette affaire pourrait s’analyser comme celui d’un arbitre chargé de trancher un litige entre deux parties : l’État du Sénégal qui demande une extradition et le prévenu, Madiambal Diagne, qui conteste cette demande. Nous pouvons croire que les juges français ont reçu et connu tous les éléments du dossier. Comme aussi, nous pouvons prendre pour acquis que l’État sénégalais a transmis l’ensemble des actes de l’affaire Madiambal Diagne pour appuyer sa demande d’extradition afin de mettre toutes les chances de son côté. Si les juges français arrivent à la conclusion que le dossier qui leur est présenté serait vide, alors, nous pouvons, légitimement et raisonnablement, croire que les motifs des poursuites contre Madiambal Diagne sont fallacieux, voire infondés. En termes simples, c’est un dossier vide.
La conséquence que devrait en tirer la justice sénégalaise, ne serait-ce que pour garder ou sauvegarder ce qui lui reste de crédibilité, est de libérer, ici et maintenant, les membres de la famille de Madiambal Diagne pris en otage (sa femme et ses deux enfants) ainsi que son ami. Leur arrestation et leur détention préventive sur la base d’un dossier vide, du seul fait d’un délit de parenté ou d’amitié et aux fins d’un règlement de compte personnel, viole les droits fondamentaux de l’Homme. Aucun(e) citoyen(ne) sénégalais(e) ne devrait accepter ce règne de l’arbitraire et de négation de la dignité humaine. Aujourd’hui, c’est Madiambal et sa famille qui sont concernées. Si nous laissons faire, demain cela pourrait nous arriver, nous et nos familles. Les limites de l’acceptable, dans une République, sont allègrement dépassées !


Pr Cheikh Faye
Canada

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